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Et surtout, dites de rien aux pédophiles !

Campagne Merci - Caméléon x LIBRE Mullenlowe

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Marquer et sensibiliser aux dangers du web face aux cyber-prédateurs (pédocriminalité numérique) c’est possible ? OUI ! La campagne MERCI de l’association Caméléon en collaboration avec LIBRE Mullenlowe nous le prouve. Au-delà de son intelligence, d’autres éléments en font une véritable réussite ! Publiée en octobre 2024, elle est déclinée en affichage et digital (vidéo). Ici, son analyse publicitaire est portée sur l’affichage.

Pour écoutez la version audio résumant l'article
C'EST JUSTE ICI
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Pourquoi cette campagne fonctionne ?

OK, exposer ses enfants sur internet c’est dangereux. On le sait tous. Mais alors pourquoi 43 % des parents publient des photos de leur.s enfant.s sur les réseaux sociaux d’après faireparterie ? Vous avez 4h. 

Malgré une prise de conscience massive, la cyber-pédocriminalité semble moins préoccuper que le cyber-harcèlement. Pourtant les pédophiles (individu attiré sexuellement par des mineurs) et pédocriminels (individu ayant une relation sexuelle avec un mineur) représentent un vrai risque pour nos enfants. Surtout car ils ont su s’adapter et utiliser les nouveaux usages des enfants. Ce mécanisme est très bien expliqué dans le reportage de Ludoc. De l’autre côté, la parole se libère avec comme exemple le procès de Joël Le Scouarnec (plus grande affaire de pédocriminalité jamais jugée en France). Ce contexte, poussé par la montée de la préoccupation des Français à ce sujet, joue sur la réussite de la campagne.  

Pourtant, ici, les prédateurs disent “merci”. Ça vous surprend ? Le public aussi. C’est en ça qu’il participe à sa réussite. Il fait tourner un sujet grave à l’absurde, la surprise et marque les esprits expliquant le nombre de re-partages sur les réseaux sociaux. À noter que “merci” est un peu utilisé dans le langage publicitaire. Une des rares publicités marquantes qui l’utilisent est la campagne Dim Up de DIM de 1991.

Ok, très bien, mais le mot “merci” et le contexte ne font pas tout le succès de la campagne. La technique utilisée, pour moi, y est aussi pour quelque chose.

Mais donc, la technique peut-elle vraiment créer l’intelligence d’une campagne ? Ici Caméléon et Libre Mullenlow répondent en partie à la question en disant OUI.

D’abord, la campagne utilise l’IA générative. Elle est mise au service de la prévention en générant des visages ce qui participe à son intelligence. Elle permet de protéger des mannequins de potentiel harcèlement liées à l’utilisation de leur image, rendant ces deepfakes (génération d’image par l’intelligence artificielle) éthiques (qui repose sur les fondements de la morale).

Ensuite l’utilisation du tilt shift (ou focus sélectif), est ici très pertinente. Pour information le tilt shift permet en mettant du flou autour d’un élément d’une image de le mettre au centre de celle-ci. C’est une technique de photographie très peu utilisée. En plus de créer un élément de démarcation, ici elle permet de mettre le pédophile ou pédocriminel au centre. L’autre intérêt est de cacher les imperfections potentiellement générées par l’IA grâce au flou.

La dernière technique est la création d’une “déformation” dans la mise en page de la signature de campagne. Regardez les affiches. Rien ne vous dérange ? Ne vous tape à l’œil ? Les lettres de la signature ne sont pas alignées. Vous imaginez bien que ce n’est pas une faute d’inattention. Pour creuser son potentiel sens caché, prenons la notion de discontinuité. Gaston Bachelard, philosophe Français, l’a pensé dans une dimension plus scientifique que sémiologique. Pour lui, les ruptures ou discontinuités sont nécessaires à l’affranchissement de l’esprit face aux conceptions scientifiques antérieures. Le lien avec cette campagne peut être que la problématique de la cyber-pédocriminalité doit être un problème sur lequel la société entière doit se pencher et résoudre.

Pour aller plus loin !

Avec autant de points positifs est-il vraiment possible d’aller plus loin ? Manque-t-il vraiment quelque chose ? Oui. Un des points central de la campagne est de montrer que l’image que l'on se fait de ces prédateurs est erronée. Pourtant la campagne oublie un profil : les femmes.

Les pédophiles et pédo-criminels ne sont pas que des hommes. Parmi eux, il y a aussi des femmes. En Grande-Bretagne, une puéricultrice a été condamnée pour “agressions sexuelles sur des enfants de 2 à 5 ans” augmentant drastiquement le nombre de plaintes pour agressions sexuelles de la part de femmes. À la suite de cet événement, le service d’assistance téléphonique « Child Line8 » a enregistré une augmentation de 132 % des plaintes pour agressions sexuelles féminines, d’après JONAS. D’ailleurs dans un contexte de libération de la parole, montrer des femmes pédophiles ou pédocriminelles est totalement aligné. Bien que cette étude ait été réalisée en Grande-Bretagne, cela ne veut pas dire qu’elles n’existent pas dans d’autres pays et en France. Bien au contraire. Simplement très peu, voir pas d’études, existe sur les femmes pédophiles ou pédocriminelles ce qui rend difficile à prouver et chiffrer.

Donc voilà ma réponse. Pour aller plus loin, et pousser le curseur au maximum, il faut représenter des femmes pédophiles ou pédocriminelles.

Au final

Au final elle nous prouve quoi cette campagne ? Simple. (Basique) Elle nous prouve que même si les associations ont de petits budgets publicitaires elles peuvent créer des campagnes marquantes. Pour le prouver rien de mieux que de fier aux chiffres :

  • Reach global de 245 243 496 avec plus de 120 retombées presse,

  • 110K vues organiques en 24h sur YouTube,

  • 274K vues et 3 000 likes sur Instagram, sans paid media en moins d’une semaine.

Tout compte fait, une campagne de prévention n’est pas toujours ennuyante. Elle peut aussi être marquante, intelligente, créative et audacieuse, le tout en servant une cause ! Alors Merci Caméléon pour ces enseignements.

L’ADN de BUP - la PUB à l’envers !

BUP est un blog qui s’intéresse aux mécanismes qui font (ou défont) la publicité. Chaque article mêle contexte socio-économique, enseignement sociologique, philosophique, technique, analytique,… pour comprendre pourquoi une campagne réussie (ou non). Sans juger leurs créateurs ou affirmant quelconque mécanisme de penser, BUP met en lumière des faits et propose des pistes de réflexion et d’amélioration.

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